Stop au tabou avec Foruforever : La mort fait partie de la vie !

Rencontre avec une startup belge qui m’a particulièrement touchée aux rewics ! On est tous, tôt ou tard, confronté à la mort d’un parent, d’un proche, d’un ami.

Souvent, nous nous sentons démunis et rapidement tout un tas de questions apparaissent après la disparition d’un être cher « Qu’aurait-elle préféré pour son enterrement ?, Avait-elle des secrets dont elle n’a pas eu le temps de nous parler ? Des anecdotes à raconter ? Quels sont ses codes d’accès ? ».

Ou simplement nous aimerions entendre encore le son de sa voix, un dernier conseil, une parole de réconfort pour nous aider à passer ce cap, tel est le pari de Sandrine Tenaud avec Foruforever.

  • Bonjour Sandrine, tu portes le projet Foruforever, tu nous expliques  ?

Il y a quelques temps je suis tombée malade, et j’ai eu un flash… Je me suis dit que si je devais mourir demain, et bien je n’avais rien de prêt pour ma famille et mes amis… à part une petite lettre « au cas où » tellement bien cachée qu’il y a peu de chances que quelqu’un la trouve. Je me suis dit que ça pourrait être intéressant de créer une plateforme de mémoire, avec plein d’outils pour aider à préparer son Album de Vie ! Après, en faisant un tour sur le net, je me suis aussi rendue compte qu’il n’y avait pas vraiment de plateforme de référence pour des pages hommage, ou «memorial» à l’américaine, créées pour les personnes déjà décédées, j’ai donc ajouté ça à mon site… et désormais, au travers d’un blog et d’un forum (que l’on vient tout juste d’ouvrir) on veut devenir la communauté de référence qui parle de la mort sans tabou sur internet.

  • Qui y a-t-il derrière Foruforever ? A combien travaillez-vous ? Et où ?

Je suis la fondatrice et conceptrice du site,  je suis épaulée par Sylvie depuis le début, elle est spécialiste en communication (et continue à travailler de son côté sur d’autres projets) elle nous rejoint ponctuellement pour travailler sur la stratégie, Jérémy est notre Community Manager & Analyst, et puis Mohamed a développé le site (mais travaille aussi à côté). Notre bureau est à Watermael.

  • Depuis quand le site est en ligne ?

Nous avons sorti le site à la Toussaint 2010, et ce n’est pas un hasard

  • Quelles difficultés avez-vous rencontrés lors de la création du projet et maintenant ?

J’ai eu la chance d’être portée par une coopérative d’activités (Bruxelles Emergences) les premiers mois, ça m’a donc permis de préparer le site, faire des contacts, d’être soutenue dans la réflexion globale, la création du business plan, de continuer à travailler pour financer le site (je suis spécialiste en communication visuelle et design)… bref toutes les étapes de construction d’une startup.

  • Des perspectives de croissance et d’évolution ?

Des partenaires financiers nous ont rejoints dans cette grande aventure, et nous sommes en train de plancher sur la version 3. Nous avons décidé de monter une fondation, dont la mission sociale est de redonner à la mort sa juste place dans la vie. Et ce principe de fondation est cohérent avec mon idée de départ, et ma personnalité.

  • Le site est assez récent, comment nous assurer que ce que j’écris aujourd’hui sera encore visible par mes proches dans 30, 40 voire 60 ans ?

Justement grâce au principe de la fondation, celle-ci assurera la pérennité et la viabilité des documents.

  • Comment être sure que mon livre de sera pas ouvert avant ma mort ?

Alors ça marche comme ça: de son vivant, le membre choisit une personne de confiance ainsi que trois personnes maximum de «vérification». La personne de confiance se voit remettre une procédure très simple avec une charte de confiance à valider, l’adresse de la page d’activation, et le code qu’il doit y entrer.

Une fois la personne décédée, sa personne de confiance active le site, en utilisant le code d’activation de l’Album de Vie. Il y a tout une procédure de contrôle (avec les personnes de vérifications et la personne qui a écrit son Album de Vie), pour vérifier que le membre est bien décédé, et une fois la page activée, personne ne peut changer l’Album de Vie crée, mais les personnes qui se connectent à la page du défunt, peuvent laisser des messages ou déposer des photos sur un forum.

  • Quel type d’utilisateurs avez-vous ? Tranche d’âge ? Malade ? Personnes âgées ? Jeunes ?

Un peu tout le monde de 21 à 83 ans … mais avec une petite majorité d’hommes de 35/45 ans.

Et puis une autre tendance, ce sont les personnes malades : le site est très utile et réconfortant pour des personnes qui se savent déjà dans un temps de vie limité. Quand on t’annonce que tu vas partir, tu es souvent prêt à te raconter, et si tu as des enfants, tu as envie de leur laisser des messages, des conseils, des images qu’ils pourront s’approprier.

Personnellement je pense qu’il est important de vivre l’esprit libre, préparer son album de vie et parler de la mort sans tabou avec son entourage, peut permettre de partir l’esprit tranquille.

  • La mort sur internet et en dehors est un sujet assez tabou… La promotion comment ça se passe ??

Très bien en Belgique (Nous avons eu beaucoup de presse national, radios La Première, BelRTL, , etc…) et un peu plus difficile en France où la mort est réellement tabou, mais nous avons tout de même eu des articles dans les plus grands journaux (Libération, Le Monde, et puis aussi sur France Inter,  TV5, LCI, etc…).

Et puis surtout nous étions présents au premier Salon de la Mort à Paris au Carrousel du Louvres, ce stand nous a permis de faire de très belles rencontres aussi professionnelles que personnelles, de participer à des conférences, et surtout d’être très sollicités par les journalistes.

  • Un blog a vu le jour… Tu nous en parles ?

Nous publions au moins deux articles par semaine, le thème du blog étant la mort, nous traitons de ce sujet à 360° : société, culturel, juridique, psychologique, etc.

Nous sommes en trains de créer un réseau d’experts qui écrivent des articles et participeront au forum, 2 experts nous ont déjà rejoints ! Le blog est de plus en plus suivi, nous le rediffusons via facebook et twitter .

  • Tu dois recevoir pas mal de témoignages ? Est-ce qu’il y en a un qui t’as particulièrement marqué ?

Oui au tout début, le témoignage d’une maman touchée par le cancer qui ne connaissait pas ces chances de guérison, et qui m’a envoyé un mail pour me remercier de lui permettre de préparer simplement des vidéos pour ces enfants.

  • Si je ne me trompe vous êtes passé d’un modèle payant à gratuit, pq ? comment êtes-vous financé ?

Tout n’est pas encore à jour sur le site, mais oui nous sommes désormais gratuit (avec juste une limite de 1GB par personne pour le moment), c’est tellement plus cohérent avec notre philosophie, et la fondation. Et tout cela grâce à nos investisseurs qui croient dans ce projet, et qui nous ont permis de passer à cette étape. J’ai aussi personnellement investi pour la création et la mise en place du site, et puis mon réseau d’amis et famille aussi m’ont aussi aidé !

Et vous ? Si vous deviez mourir demain, que laisseriez-vous à votre entourage ?

  •  merci louise pour cette interview et pour oser parler de la mort dans ton blog … :-) sandrine

  • C’est normal de soutenir les initiatives sympathiques ;-)